Encourager ses employés à aller sur Facebook ? Oui, mais pour recruter ! Fondée par Stéphane le Viet en 2010, Work4Labs, aujourd’hui rebaptisée Work4, propose des solutions pour recruter des collaborateurs via « le plus grand vivier de candidats au monde  » : Facebook. Rencontre avec Etienne Dargnies, CEO de Work4, qui nous explique les enjeux du recrutement social et mobile, à l’heure où certaines marques commencent à peine à prendre le pas de la digitalisation…

Racontez-nous votre parcours ?
Après ma formation d’ingénieur aux Ponts et Chaussées, j’ai entrepris un master à HEC Entrepreneur. J’ai fait mes classes chez Atexo durant trois ans, dans le domaine de la confiance électronique. Après avoir fait un voyage en 2 chevaux de France jusqu’en Inde, en passant par l’Afrique, j’ai écrit un livre Ma foi pour tout bagage. C’est après cette expérience que j’ai rejoint Nextedia. J’ai d’abord monté Nextpremium, une régie de display à la performance, puis j’ai repris la direction de Nextdata, qui représente la partie CRM de Nextedia, enfin j’ai repris la direction de Nextedia au niveau global. Puis j’ai rencontré Stéphane Le Viet, cofondateur de Work4, qui recherchait un CEO pour son entreprise. Nos deux sociétés avaient des tailles similaires, et par ailleurs les mécanismes du recrutement et les mécanismes du marketing, sont en fait très similaires finalement. Mon expérience dans le marketing digital me permettait d’anticiper les changements par lesquels allait passer le recrutement dans le cadre de sa digitalisation. J’ai été attiré par la mission de l’entreprise, car recruter par Facebook était pour moi une évidence. Ensuite c’est une société franco-américaine et cette dimension me plaisait. Enfin, l’ambiance et les équipes me paraissaient de très bon niveau, ainsi que l’esprit entrepreneurial et l’autonomie de chacun.

Êtes-vous familier avec l’univers du luxe, et ses enjeux, aussi bien en termes de digitalisation du marketing que du recrutement ?
C’est un univers que j’ai un peu côtoyé chez Nextedia. Je pense effectivement que la digitalisation représente une étape majeure pour l’industrie. Avant, les grandes marques pouvaient se permettre d’envoyer un seul et unique message à tout le monde, et c’était aux clients de s’adapter. C ‘était particulièrement le cas pour le recrutement : si les sites web étaient très compliqués, les candidats s’adaptaient. Postuler était un vrai chemin de croix, mais lorsqu’on a un statut très fort, on peut se dire que c’est les plus battants qui arriveront jusqu’au bout. Le luxe était protégé par son statut, mais la tendance est en train de s’inverser. La donne change, et les marques se repositionnent pour continuer à attirer les talents, et les garder. 

Les marques sont-elles plus à l’écoute des techniques de recrutement sur les plates-formes sociales et mobiles ?
Je dirais que le chemin est encore grand. Le seul aspect réseau social qu’elles maîtrisent, à mon sens, c’est LinkedIn. C’est par essence un réseau professionnel, qui a eu beaucoup de succès dès le départ grâce à ses deux fonctions principales : la dimension RH et la dimension commerciale. C’est aussi un outil facile à utiliser pour les personnes en entreprises.

En revanche, elles sont complètement perdues lorsqu’il s’agit d’utiliser les autres plates-formes sociales, notamment celles qui ne sont pas orientées business. Plus on est haut dans la pyramide des âges et la pyramide de l’entreprise, plus on accentue la distinction entre réseaux pros et réseaux persos. A l’inverse LinkedIn est moins utilisé par les moins qualifiés. Je remarque que souvent les entreprises ne comprennent pas cette tendance. Cela évolue, mais je suis surpris de constater la lenteur des évolutions Sur les réseaux sociaux, à part certaines opérations événementielles orchestrées par des agences, qui vont faire le buzz, je ne constate pas de vraies stratégies. Idem sur mobile, je suis surpris du temps que cela prend.

De même, pour postuler dans une entreprise aujourd’hui, il faut souvent le faire sur desktop (ordinateur), c’est quasiment impossible sur mobile. En effet, elles ont mis en place des ATS, qui servent à gérer le flux de candidatures en interne. Ça n’a pas été pensé pour les candidats mais pour les entreprises.

Les entreprises pensaient qu’en mettant plein de barrières, elles n’allaient garder que les meilleurs : c’est faux. Lorsque les candidats les plus qualifiés constatent la difficulté du processus de recrutement, ils ont peu envie de rejoindre l’entreprise…

Il n’y a donc pas cette révolution d’être « candidate centric », et particulièrement pas sur mobile. Par exemple, les entreprises ne voient pas que la vie des gens est sur mobile. Tout le monde a un smartphone, et il faut prendre en compte son utilisation, notamment les applications. C’est pour ça que Facebook est si fort, c’est une fenêtre sur le monde : sur mes relations, sur les news, sur le shopping, mais aussi sur le marché de l’emploi. C’est tous ces profils mobile-only que les entreprises manquent en déployant leurs processus de recrutement sur desktop uniquement. Il devient indispensable de penser mobile. 

Justement, Work4 a développé une expertise sur le recrutement mobile, mais pourquoi est-elle réservée à Facebook ?
Facebook au sens large, c’est-à-dire le groupe Facebook, même si la colonne vertébrale de Facebook est Facebook en tant que réseau social. Quand on dit qu’on est expert sur mobile, c’est parce que le trafic sur Facebook se fait à 80% sur mobile. Depuis la création de Work4, nous considérons Facebook comme une véritable mine de talent complètement inexploitée, et nous créons des ponts entre les recruteurs et les utilisateurs. Dès le premier jour de Work4 nous nous sommes rapprochés d’eux, nous avons donc été partenaires de Facebook depuis le départ, en 2010. Partenariat qui s’est renforcé avec la création de workplace by Facebook. De même, lorsqu’ils ont lancé Facebook Jobs, nous avons naturellement été partenaires de l’initiative. Mais Facebook Jobs a surtout été pensé pour les PME, et aujourd’hui nous nous proposons d’accompagner les grandes entreprises dans l’écosystème Facebook Jobs, en créant des flux upstream notamment, qui nous permettent de reformater les offres de nos clients afin de les poster sur la plateforme, et des flux downstream, qui nous permettent de récupérer les candidatures pour les pousser dans l’ATS de nos clients. 

De façon générale, nous proposons quatre produits : W4 Mobility pour la partie mobilité interne, W4 Ambassadors pour la cooptation, W4 app dédiée aux candidats actifs et W4 Pipeline pour les candidats passifs.

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Faites-vous appel à des services spécialisés dans le matching ?
On fait nous-mêmes des scorings grâce à des algorithmes afin d’évaluer le degré de qualité et d’avoir des procédures qui simplifient et priorisent le traitement des candidatures.

Vous avez fait une campagne W4 sur Welcome to the Jungle. Pourquoi ne pas avoir utilisé vos forces et compétences pour vendre la marque ?
On le fait aussi ! Nous encourageons nos clients à utiliser différentes solutions, alors nous appliquons à nous-mêmes aussi ces recommandations. Il y a par exemple des profils excellents qui ne sont pas sur Facebook, il ne faudrait pas les manquer. Facebook est un levier, mais ce n’est pas le seul, et même pas forcément le premier. Tout dépend de ce que nos clients recherchent. Nous-mêmes, pour les profils que l’on recrute, nous n’utilisons pas exclusivement Facebook.

Est-ce que les expertises que vous avez développées peuvent être appliquées à LinkedIn par exemple ?
On se concentre sur Facebook parce que LinkedIn a été construit POUR créer des ponts entre recruteurs et candidats. Sur Facebook, il y a un vrai besoin, un vrai potentiel inexploité.

Comment voyez-vous l’évolution du recrutement ?
Microsoft, Google et Facebook se sont récemment lancés sur le segment du recrutement. L’arrivée de ces trois mastodontes va forcément révolutionner l’industrie du recrutement avec. Les job-boards se retrouvent menacés, même les cabinets de recrutement dont les deux grandes forces (que sont leurs bases de données et leur capacité d’interaction avec les candidats), vont être challengés par ces gros acteurs. 

Quelles seraient les bonnes pratiques en termes d’usage et de stratégie d’une campagne de recrutement ?
Il est primordial d’être « candidate centric » : d’abord être clair sur qui l’on veut recruter. Au même titre que pour le marketing qui est « customer centric », il est fondamental de s’intéresser aux clients et à leur mode de fonctionnement, les recruteurs doivent connaître leurs candidats et définir leur stratégie à partir de là.

A titre d’exemple : si l’on cherche à recruter un vendeur en magasin, un serveur ou une infirmière, il est fondamental de connaître la journée-type de ces profils, afin de comprendre que ce ne sont pas des gens qui passent du temps sur leur ordinateur. Il serait donc absurde de mettre en place une campagne de recrutement sur desktop pour recruter ce type de profils. 

Une fois qu’on a cerné le type de profil qui nous intéresse, comment faire pour le toucher, l’intéresser ?
La communication passe d’abord par une image, il faut donc une image qui va le faire s’arrêter, avec des codes qu’il reconnaît, un texte qui va lui parler. Pour connaître les images et textes les plus impactants, on va réaliser des tests comparatifs, potentiellement interviewer des profils similaires pour connaître leur ressenti.

Il faut également garder en tête que c’est un candidat passif, qui n’aura pas forcément son CV à portée de main (surtout sur mobile), ni le temps ni l’envie de répondre à de trop nombreuses questions. Si, en tant qu’entreprise, je ne suis pas prête à adapter mon comportement et mon processus de recrutement à ce contexte, je ne trouverai pas mon candidat, ou je passerai à côté de nombreux profils adaptés.

Au niveau du luxe, même si l’industrie a mis du temps à se digitaliser, elle a très rapidement compris l’importance d’être « customer centric », qui s’est rapidement gravée dans son ADN. Par contre, l’aspect « candidate centric » est encore à travailler pour beaucoup d’entreprises.

Vos services s’appliquent-ils justement à l’univers du luxe ?
Bien sûr, nous avons d’ailleurs déjà collaboré avec plusieurs marques de luxe, car nos services sont adaptés à tous les métiers plutôt peu qualifiés, tels que la vente, les métiers de logistiques… Des métiers que l’on retrouve chez tous les secteurs, notamment le luxe. 

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