Si son nom vous dit quelque chose, ce n’est sûrement pas le fruit du hasard. Fondée en 1974, la maison Comptoir Sud Pacifique s’est rapidement forgé une réputation parmi les marques de parfumerie de niche, prisée pour ses fragrances aux senteurs inspirées des nombreux voyages de ses fondateurs. Alors que la griffe s’était endormie au fil des ans, c’est en 2011 que Valérie Pianelli-Guichard reprend la marque, bien décidée à redonner un nouveau souffle à cette belle maison. Une aventure entrepreneuriale placée sous le signe du courage et de la passion.

Pourquoi avez-vous souhaité racheter la marque Comptoir Sud Pacifique ?
Pharmacienne de formation, je me suis ensuite tournée vers l’économie en suivant un cursus spécialisé de l’ESSEC. Puis j’ai rejoint le groupe Pierre Fabre il y a près de quarante ans, d’abord dans la branche médicaments puis dans les cosmétiques. Après avoir passé la majorité de ma carrière au sein du groupe, j’ai eu envie de me lancer afin de voir ce dont j’étais capable. J’ai alors démissionné avec la folle envie de me consacrer à la recherche d’une entreprise à racheter, tout en restant dans un domaine que je connaissais bien, celui des cosmétiques.
Il m’a fallu près d’un an pour trouver l’entreprise de mes rêves, que je puisse racheter seule. Dans le monde de l’entrepreneuriat, il y a très peu de femmes sur le segment de la reprise de sociétés, il m’a donc fallu redoubler de motivation pour faire preuve de la crédibilité.
Puis, à force de parler de mon projet, l’opportunité de reprendre Sud Pacifique s’est présentée. Ce fut le coup de foudre.

Par quoi commence-t-on lorsque l’on reprend une entreprise ?
Lorsque nous avons commencé à gratter, nous nous sommes rendu compte que la société n’allait pas bien, qu’elle allait droit vers le dépôt de bilan. L’état était plutôt catastrophique, et l’expert comptable ne cessait de me demander si j’étais sûre de mon choix. C’est à ce moment-là que vous devez avoir une vision pour la marque, tout en faisant face à la grande solitude qui est le lot quotidien des entrepreneurs.

Quelle était votre vision, justement ?
La marque avait du potentiel, mais elle était quasiment arrivée à un point de non-retour car les anciens propriétaires pensaient pouvoir faire d’une marque de niche, une marque de distribution sélective. La marque avait perdu tous ses clients, sans parvenir à en conquérir de nouveaux. Lorsque j’ai repris Comptoir Sud Pacifique, j’ai fait marche arrière toute pour lui rendre son identité originelle, en réintégrant le bleu Comptoir par exemple, et la repositionner en marque de niche.

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Les clients sont-ils revenus ?
Ma première mission a tout d’abord été d’aller me présenter aux clients BtoB afin de leur présenter mon plan de route, que j’avais établi sur trois ans. L’un des atouts de la marque, était le fort capital sympathie de la part du marché. Cela a donc été plutôt facile de les convaincre de rejoindre l’aventure. Par la suite, les clients ont naturellement fini par revenir.

Quel est le bilan, sept ans plus tard ?
Après la phase de repositionnement et d’harmonisation, une fois les dettes réglées, la marque est devenue rentable au bout de 4 ou 5 ans, ce qui m’a permis de réaliser des investissements, et notamment d’ouvrir des boutiques en France, qui reste notre marché principal. D’ailleurs, la seconde boutique ouvrira ses portes au début du mois de décembre, au 76, rue de Seine, dans le 6e arrondissement.
L’ouverture de boutiques nous a également permis d’élargir l’univers de la marque, toujours empreint du thème du voyage, avec des collections d’accessoires, de sacs, de pochettes…

Quels sont les prochains axes de développement ?
Le gros chantier de 2018, ce sont les cosmétiques. Nous avons déjà une ligne corps que nous souhaiterions remettre d’actualité. Quels que soient les produits que nous développons, l’objectif pour nous est de rester dans un excellent rapport qualité/prix.

Comment se déploie votre réseau de distribution ?
Nous avons des distributeurs aux Etats-Unis et au Canada (chez Nordstrom, Sephora ou dans des concept-stores), en Russie et au Moyen-Orient. Notre plus gros marché est pour l’instant l’Europe, notamment la France, l’Italie et l’Allemagne, qui sont les marchés historiques du parfum.
Internet représente notre premier générateur de chiffre d’affaires, avec une croissance de plus de 20 % par an.
Aux USA, nous sommes confrontés à de la revente sur certains sites avec lesquels nous ne travaillons pas, mais il n’est tout simplement pas envisageable de ne pas être présents sur Internet. Pour limiter les déconvenues, nous avons noué un partenariat avec Amazon afin d’être distribués sur leur segment Luxe.

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Comptoir Sud Pacifique en quelques chiffres ?
La marque est aujourd’hui présente dans une vingtaine de pays. Les résultats sont excellents, en 2016, le chiffre d’affaires a progressé de +15 % à 6,5 millions d’euros. Ces performances nous permettent de nous développer, avec l’ouverture de la seconde boutique rue de Seine par exemple, mais également d’élargir notre offre produit. Nous allons prochainement dévoiler une nouvelle fragrance : Vanille Blackberry.

Vous êtes également distribués chez Beauty Success depuis trois ans ?
Oui, car leur discours m’intéresse et cela me permet d’être distribuée dans des zones géographiques où nous ne nous serions pas forcément implantés par nous-mêmes, cela me permet d’étendre la cible. Cela représente également la nécessité de former les vendeuses afin qu’elles puissent faire connaître notre marque à un public qui entre pour Chanel ou Dior. Aujourd’hui, nous progressons très bien chez Beauty Success, c’est un partenariat devenu rentable pour eux comme pour nous.

Qui est en charge de la création des parfums ?
Je travaille souvent avec Thomas Fontaine, et nous avons beaucoup collaboré avec Expressions Parfumées. En fonction de l’idée, je m’adresse à des nez différents, car ils ont tous une sensibilité et une écriture particulière. C’est aussi parfois une histoire de rencontres.
L’avantage d’une entreprise de cette taille c’est qu’on peut se permettre d’innover. Les enjeux économiques ne sont pas les mêmes que pour une grande marque.

Sept ans plus tard, en tant qu’entrepreneuse, quels enseignements tirez-vous de cette expérience ?
Je ne pense pas qu’il y ait d’enseignement particulier, c’était un défi personnel. Aujourd’hui, je retenterais l’expérience sans hésitation.
Désormais, mon objectif est de trouver les clefs pour passer à la vitesse supérieure, je ne veux pas me retrouver coincée dans quelque chose qui devienne trop statique. Peut-être faire rentrer des fonds d’investissement pour passer à la vitesse supérieure, se développer en franchise… J’y réfléchis. Affaire à suivre !